Avons-nous encore besoin des coopératives funéraires ? - Chroniques | Coopérative funéraire de l'Outaouais

Avons-nous encore besoin des coopératives funéraires ?

En mai 2008, les coopératives funéraires du Québec soulignaient avec fierté le 20e anniversaire de leur fédération. Pour marquer l’événement, la Fédération a fait paraître un album relatant l’historique du mouvement et des coopératives. Le 20e anniversaire a été célébré en présence de 250 convives lors de notre congrès annuel qui se tenait à Longueuil. Notre invité d’honneur, monsieur Claude Béland, est venu nous rappeler ses convictions coopératives en plus de relater quelques éléments de l’histoire de notre mouvement.

Rappelons qu’un bon nombre de coopératives funéraires ont été fondées dans les années 1970 à une époque où les solutions collectives s’imposaient pour se réapproprier des pans de notre économie. À cette époque, les frais funéraires grimpaient en flèche, ce qui entraînait beaucoup d’endettement pour les familles qui avaient le malheur de perdre un proche.

Les coopératives, qui avaient permis aux caisses populaires de même qu’aux secteurs agricole et de l’alimentation d’offrir de meilleures conditions aux membres, constituaient une formule de choix. L’Abitibi, le Lac-Saint-Jean, l’Estrie, l’Outaouais, le Saguenay, la région de Québec, la Beauce, le Bas-St-Laurent, la Montérégie et le Centre du Québec ont tous vu un groupe de citoyens fonder une coopérative, souvent avec la participation du clergé. Partout au Québec, les gens ont utilisé la formule coopérative pour se redonner une emprise sur un secteur de l’économie où ils étaient particulièrement vulnérables.

Le mouvement s’est poursuivi dans les années 80 avec la fondation de coopératives à Saint-Hyacinthe, Victoriaville, Shawinigan, Thetford Mines et Mont-Laurier.

Grâce à la présence de coopératives, le prix des funérailles au Québec a connu une baisse, autant chez les coopératives que chez leurs concurrents qui n’avaient plus le monopole. Les coopératives sont ainsi devenues un chien de garde dans l’industrie funéraire, en freinant la hausse des prix des frais funéraires. Depuis leur fondation, les coopératives ont permis aux familles québécoises d’économiser des millions de dollars.

Dans les années 90, une autre menace est venue nous rappeler l’importance de la solidarité coopérative. Devant le vieillissement de la population, d’importantes multinationales américaines ont débarqué au Québec et ont pris le contrôle d’environ 40 % de notre industrie funéraire. Des entreprises qui avaient appartenu à des générations de Québécois sont soudainement devenues propriétés américaines, sans changer le nom de l’entreprise. Avec la collaboration de Desjardins et le gouvernement du Québec, la Fédération des coopératives funéraires a créé un fonds de développement pour contrer la menace américaine et protéger les intérêts québécois dans l’industrie funéraire. Dans cette foulée, d’autres coopératives ont vu le jour à La Baie, Chicoutimi, Rivière-du-Loup, Saint-Marc-des-Carrières et Berthierville. Encore une fois, la mobilisation créée par les coopératives a endigué la perte de contrôle du secteur funéraire.

On vient de le voir, la présence des coopératives constitue un frein à la hausse des frais funéraires au Québec. Elle permet aussi de protéger ce secteur de l’économie, de conserver la propriété québécoise de ces entreprises et de se doter d’institutions funéraires conformes à nos valeurs et à nos véritables besoins.

Alors, la question se pose : en 2008, avons-nous encore besoin des coopératives funéraires? Poser la question c’est y répondre. Avons-nous besoin d’économiser des millions de dollars chaque année grâce à la présence des coopératives? Souhaitons-nous laisser les multinationales américaines prendre possession de nos institutions funéraires? Voulons-nous poser un geste de solidarité communautaire et nationale en faveur de nos intérêts sociaux et économiques? Voulons-nous être client d’une entreprise ou membre propriétaire d’une coopérative?

Encore récemment, deux coopératives ont vu le jour dans des régions où elles étaient absentes. À Gaspé et à Montréal, deux régions qui ont peu en commun, des citoyens ont choisi la formule coopérative pour s’assurer que les profits de l’activité funéraire enrichissent leur collectivité et demeurent propriété de leur patrimoine. Des rencontres de citoyens dans d’autres provinces canadiennes laissent présager la formation de nouvelles coopératives funéraires à l’extérieur du Québec, en plus de la quinzaine déjà présentes. Plus loin de nous, à Seattle, un groupe d’entreprises funéraires a choisi de se constituer en coopérative afin de faire face aux multinationales concurrentes qui tentent de contrôler l’industrie. Lorsque vous lirez cette revue, un groupe de coopérateurs de la Fédération reviendra d’une mission en Angleterre organisée en vue d’étudier le fonctionnement d’une des plus grandes coopératives funéraires du monde. Partout dans le monde, la formule coopérative demeure actuelle pour se doter d’une alternative à l’exploitation du chagrin.

Petit à petit, les coopératives funéraires du Québec ont gagné du terrain pour occuper aujourd’hui environ 15 % du marché québécois. Chaque année, plus de 7500 familles québécoises font confiance aux coopératives pour organiser le départ d’un des leurs.

Aujourd’hui, les 28 coopératives du Québec sont dotées d’installations des plus modernes et peuvent compter sur du personnel des plus compétents. Tout en modernisant leurs installations et leurs équipements, les coopératives sont restées fidèles aux valeurs des pionniers, soit l’entraide, le respect, l’absence de pression et la compassion.

En cette année anniversaire de notre fédération, le mouvement coopératif affiche sa fierté d’avoir bâti le réseau que nous avons aujourd’hui. Devant cette réussite, je lève mon chapeau aux bâtisseurs de toutes les coopératives du mouvement qui ont choisi la coopération pour former aujourd’hui le plus important réseau funéraire au Québec.

Réjean Laflamme
Président de la FCFQ
Photo : FCFQ


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